Redoute_des_Contrepèteries

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Invité
Je voudrais ouvrir ici à mes risques et périls un nouvel espace de divertissement linguistique (l'aimable aval du but s'y agite - où l'on reconnaîtra une soumission du projet à l'autorité de tutelle qui emprunte déjà la forme de ce qui s'ourdit) : celui de cet art à la fois raffiné et obscène qui porte le nom scabreux de : «Contrepèterie».

Comme chacun le sait, il s'agit de déclarations formelles pourvues immédiatement d'un 'sens' politiquement_correct, dans lesquelles une permutation formelle de lettres (isolés ou groupées : voyelle/consonne ou diphtongue) produit un 'contre_sens' délibérément obscène.

Ainsi, la contrepèterie est au Français ce que Talleyrand était à l'Empereur des Français : «une merde dans un bas de soie».

Cet art emprunte au vieux fond Gaulois des mâles Français (il ne s'est jamais constaté que les femmes aient une grande affinité pour la contrepèterie) : gaillardise et paillardise. Mais cette vulgarité foncière de l'inspiration, revendiquée et assumée, s'articule avec un respect_formel pour la langue (la contrepèterie n'est donc jamais grasse, comme lorsque le langage s'abaisse afin que l'ordure se montre à ciel ouvert ; au contraire, elle 'gaze' toujours des habits du dimanche de la langue les faisanderies risibles de la vie humaine).

C'est dire si la contrepèterie réclame un esprit de perversité jouant sur deux tableaux à la fois. Elle est donc réservée au groupe (plus étroit qu'on ne pourrait l'attendre) des «cochons_respecteux» (comme Sartre de son côté parlait de «P... respectueuse»), et non pas 'respectables'.

Qu'un fumet puissant s'élève des contrepèteries - nul ne saurait donc s'en offusquer des plus rares qu'on n'imagine à pouvoir et savoir les deviner. Car ils se rallient tous sous la bannière du truculent Rabelais : «Ci n'entrez pas, hypocrites, bigots, vieux matagots, marmiteux boursouflés!».

Pour ce qui est, non plus du contenu, mais des règles formelles des contrepèteries, la plus simple est que la déclaration de base autorise, par permutation littérale binaire en valeur acoustique, la production d'une deuxième déclaration sans ajout ni perte formelle pourvu d'un sens obscène. Un exemple fameux :

La Chine se soulève à l'appel des Nippons

Ce type de contrepèterie, s'il autorise par permutation formelle le surgissement d'un sens obscène en contrepoint du sens convenable, ne relie pas néanmoins les deux ordres de sens. C'est pourquoi on peut parler ici de contrepèterie du «1er degré». En regard, il existe des contrepèteries de «2è degré», plus recherchées, dans lesquelles le sens convenable et le sens obscène se solidarisent pour donner la vision surprenante d'une 'totalité', parce que le sujet de la déclaration demeure le même. Ainsi la célèbre contrepèterie :

Le fakir arrive à pied par la Chine​

où les deux niveaux de sens se rapportent au même sujet, quoique la performance et l'itinérance de ce dernier constituent des registres tant soient peu hétéroclites. À ce point de vue, la contrepèterie :

Les jeunes filles réservent toujours leur cœur pour les vaincus​

m'a toujours paru la plus parfaite et la plus belle des contrepèteries, car les deux sens rapportés à un même sujet s'organisent en une 'totalité éthique' (où les Féministes - à les supposer par extraordinaire aptes à deviner l'art de la contrepèterie - liraient une preuve de l'inadmissible machisme du mâle François). Que dire alors de ce simple énoncé d'un fait historique? - Lorsque le Général Dumas (faut-il rappeler qu'il était mulâtre des Antilles) se présenta à Madame Élizabeth Vigée le Brun pour qu'elle lui peigne le portrait, galamment il s'inclina devant elle pour un baise-main en déclarant respectueusement :

Madame Vigée le Brun...​

Étant donné la difficulté remarquable d'arranger la langue pour que ses déclarations se prêtent à contrepèterie, je pense qu'il doit être possible d'autoriser un 'droit_de_joker', c'est-à-dire certaine licence_acoustique à la lecture de la permutation littérale, afin d'autoriser la légitimité de contrepèteries admirables que le strict respect des valeurs acoustiques empêcherait de valider. Je pense ici à cette fabuleuse trouvaille qui fait partie, dans sa fulgurante brièveté, des contrepèteries les plus ingénieuses qui soient :

L'aspirant habite Javel​

☞ s'il se trouvait, parmi les habitués du Bar, quelques cochons_respectueux, autant dire : lit-terreux_pervers, épris de contrepèteries - invités soient-ils à montrer ici s'ils ont culte au débit...

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Réactions: rabisse
Cet art emprunte au vieux fond Gaulois des mâles Français (il ne s'est jamais constaté que les femmes aient une grande affinité pour la contrepèterie) : gaillardise et paillardise
* il y a cela aussi dans d'autres langues
*et coté féminin
je ne parle pas de l'intitulé de la rubrique dédiée du Canard, au sujet de laquelle la page dédiée wikipedia évoque ...quelques hypothèses de contrepets dans l'intitulé
l'album de la Comtesse
 
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☞ s'il se trouvait, parmi les habitués du Bar, quelques cochons_respectueux, autant dire : lit-terreux_pervers, épris de contrepèteries - invités soient-ils à montrer ici s'ils ont culte au débit...
♧
Je ne suis pas un habitué du Bar… mais si je suis invité… :rolleyes:

Pâté en croûte
Jus de canne
Chaise de bois
 
Effectivement ça fait sens Ze_Big - je vois bien le commandant du port (car, ne l'oublions pas : rien ne vaut au matin comme un bon coup de Byrrh) visitant l'armoire aux trophées, n'était ce clip intercalaire de Desperate Housewife en train de ranger les kangourous de son Jules (oh! Wanda...)

Afin de restaurer la moralité du paysage, j'improvise cette contrepèterie_rétrograde double :


But de la vie : suspends les boycotts!
 
cela me rappel lorsque mon ancienne directrice, qui ne voulait pas que je sois en congés en même temps qu'elle, m'avait demandé quelle semaine je préférais. je lui avais alors dit très fier de moi : je le laisse le choix dans la date.

je trouve tout l'art du contrepet dans ces moments où l'on peut en placer une sans que l'autre ne s'en aperçoive. :D
 
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cela me rappel lorsque mon ancienne directrice, qui ne voulait pas que je sois en congés en même temps qu'elle, m'avait demandé quelle semaine je préférais. je lui avais alors dit très fier de moi : je le laisse le choix dans la date.

je trouve tout l'art du contrepet dans ces moments où l'on peut en placer une sans que l'autre ne s'en aperçoive. :D

C'est aussi ma préférée :)
 
L'aspirant habite Javel​
Puisque celle-ci a droit au titre de contrepèterie, je vous propose celle-la dans le même style - un contrepet 'pur' et des déplacements de syllabes et sons :

'Eric, il faut un caviste bon et calme pour eux sept'​

La solution étant bien évidement hors charte ne comptez pas sur moi pour vous la donner :p
 
Dans les contrepèteries cachés de notre quotidien...

"Salut Fred"

Je vous accorde qu'elle est limite mais tellement proche.
 
Puisque celle-ci a droit au titre de contrepèterie, je vous propose celle-la dans le même style - un contrepet 'pur' et des déplacements de syllabes et sons :

'Eric, il faut un caviste bon et calme pour eux sept'​

Si vous n'y arrivez pas je veux bien vous la donner :p

je sèche :rose:
 
une célèbre en attendant

6 fûts, 6 caisses, un doigt dans le trou du fût, une main entre les caisses.
 
La parole a précédé l'écriture, nous disent les philosophes. Cette forme de communication s'adresse à l'oreille de l'interlocuteur, dans l'espoir que, doué d'entendement, il se montre bon entendeur. Or la parole, comme le remarquent les linguistes, délivre un flux sonore continu, et l'auditeur n'y entend quelque chose qui fait sens qu'à condition de découper à la volée ce flux de la parole en unités sonores : les mots, pour les relier en une combinaison pourvue de sens : une phrase.

Ce découpage, l'écriture le présente d'une façon qui saute aux yeux, en séparant les mots par des espaces. Pour entendre le flux de parole de quelqu'un, l'auditeur a donc besoin de l'écrire en mots distincts sur la page de son imagination. Cela, pour relier en une phrase ces mots, ce qui s'appelle une lecture. Entendre la parole d'autrui, c'est donc commencer par l'écrire sur une page d'imagination pour mieux la lire comme une phrase.

En quoi il s'avère que la parole suppose son écriture pour être entendue. Mais inversement qu'écrivons-nous en forme de mots sur cette page d'imagination, sinon des valeurs acoustiques, càd. des sons par lesquels s'opère l'ébruitement? C'est pourquoi, lorsque je lis un livre, je l'entends me raconter quelque chose ; vice-versa, lorsque j'entends la parole d'un interlocuteur, je lis sur la page de mon imagination la lettre qu'il est en train de m'écrire.

Les choses sont donc toujours plus mêlées qu'on ne s'en avise : l'accouplement de la parole et de l'écriture, du son avec le signe, du souffle avec l'articulation opère toujours.

Je gage que les esprits sensibles à l'art de la contrepèterie sont ceux qui, par une sorte de sagacité remontant à l'époque de l'apprentissage du langage : l'enfance, s'avisent toujours que l'articulation du son en mots, cette écriture donc de la parole qui permet de la lire afin de l'entendre - comme toutes les copulations présente une laxité qui est son jeu.

Jouer avec les mots est une marque de fidélité à cette copulation du flux sonore avec l'écriture des mots : il y a toujours à la jointure un libre-jeu, garant d'un mouvement de va-et-vient dans l'articulation. Licence est donc donnée, par fidélité à la plasticité du souffle sonore, d'en articuler l'émission, c'est-à-dire de l'écrire, autrement qu'en conformité avec l'habitude et la routine convenues. En quoi s'insuffle la plasticité sonore dans l'articulation écrite - où se reconnaît à l'état naissant : la poésie.

Comme le publie un expert en matière de copulations de tous genres : Victor Hugo : «Dans la Poésie, les mots font l'amour». Eh bien! La contrepèterie (en laquelle il excellait) préserve quelque chose de ce jaillissement du poétique comme licence articulatoire du souffle sonore. Et pour en administrer une preuve obvie, l'exercice le plus simple d'une telle licence consiste, sans rien changer à l'émission d'un flux sonore, à déplacer simplement les coupes par lesquelles notre entendement écrit la parole en mots sur la page de l'imagination :

Et le désir s'accroît quand l'effet se recule

Les auditeurs du «Polyeucte» de Corneille ne manquèrent pas, à l'époque, d'exercer leur licence d'articulation afin d'entendre à contrepèterie ce vers noble. Dans le même ordre de procédé appliquant au flux sonore la liberté articulatoire, il est toujours bon de réécrire cette parole pieuse sur la page licencieuse de l'imagination :

Bonnes œuvres : la petite sœur qui quête pour les pauvres qu'ont froid​
 
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Dans un imaginaire collectif déjà arrimé à l'amure de la Côte - laquelle n'est peuplée que de vacanciers à l'enviable boîte et d'estivantes assises sur des bittes portuaires n'ayant que mépris pour la menthe forte - les bords de Marne (en témoignent les contes de Maupassant) se sont taillé la réputation dominicale d'offrir une verte auberge de marins d'eau douce habiles à mener la fille en chaloupe sur un air de java :

Le vent siffle dans la rue du quai
permettez
Madamoiselle
que je cesse de crêcher en poupe
pour aller prendre quart au pont
avant que ça pète
 
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Réactions: daffyb
De Lanza del Vasto :

Malgré les printemps revenus
Dans mon cœur comme un rameau nu
Toi que jamais, jamais je n'eus
Faut-il que seule je te sente,
Dans mon cœur comme un rameau nu ?


Après cela, ne reste plus qu'à tirer l'échelle !
 
C'est pourquoi, lorsque je lis un livre, je l'entends me raconter quelque chose.

c'est pour cette raison que j'étais toujours dérouté lorsque, enfant, je voyais un Astérix au cinéma. il n'avait pas la même voix que dans la bande dessinée...
mais je m'éloigne du contrepet ;)


une petite pour me faire pardonner : je crains l'avidité des concierges!
 
Bienvenue matacao dans l'aire des contra_ventistes :D

L'ami Powerdom ne va pas être ravi que tu lui pompes_l'air qu'il avait déjà soufflé au message #6 :

cela me rappel lorsque mon ancienne directrice, qui ne voulait pas que je sois en congés en même temps qu'elle, m'avait demandé quelle semaine je préférais. je lui avais alors dit très fier de moi : je te laisse le choix dans la date.

je trouve tout l'art du contrepet dans ces moments où l'on peut en placer une sans que l'autre ne s'en aperçoive. :D

Personnellement, je la trouve très bonne parce qu'entre autres excellentes qualités, ainsi que le dit Powerdom elle est de_circonstance, comme on disait des bons_mots (souvent en réserve et pas forcément improvisés) qu'il fallait savoir placer - à l'époque où régnait l'art de la 'Conversation' dans les Salons. Si Powerdom avait rétorqué à sa directrice un :

il faut être peu pour bien dîner

- contrepèterie de bonne facture par ailleurs - cela aurait produit un effet de cheveu dans la soupe plutôt que de contre_vent profitant du courant d'air de la conversation. Évidemment, seuls des esprits mal tournés constamment en train de fabriquer des contrepèteries in petto peuvent couramment en improviser qui se placent à point choisi dans le cours d'une conversation (j'ai connu un camarade dont l'esprit avait tellement hissé la grand voile de la contrepèterie qu'il ne pouvait plus s'empêcher dans le cours de la conversation de chercher les contre_vents possibles de toute émission ouïe de parole. Autant dire qu'il n'entendait plus à rien que du vent...).

Comme il n'est donc pas enviable d'improviser des contrepèteries afin de les placer à la volée dans la conversation, il peut être par contre délassant de s'exercer à loisir, sinon à en créer de neuves (ce qui est «une autre histoire» - comme le déclarait toujours Rudyard Kipling), du moins à imaginer pour des contrepèteries connues une historiette capable d'inventer un contexte_imaginaire dans lequel il aurait été du meilleur 'air' de les placer.

En honneur donc à l'ami Powerdom qui a signalé cette exigence, je propose d'appeler : «Récitation_powerdonienne» la narration brève d'un contexte imaginaire dans lequel l'énoncé d'une contrepèterie prend sa valeur contra_ventiste.

Ainsi, au lieu de faire tomber comme un cheveu dans la soupe (des forums de MacGénération :D) telle ou telle contrepèterie qui prend l'air d'un missile parfaitement déplacé (ce qui rend pénible, à mon goût, les recueils de compilation de contrepèteries, faute précisément de «Récitation_powerdonienne» qui leur fournirait le contexte imaginaire d'une historiette), présenter une contrepèterie dans le contexte d'un récitatif bref me paraît un moyen sûr de la rendre d'autant plus agréable à l'esprit. Afin qu'elle joue le rôle de déclencheur du rire, dont le grave Henri Bergson n'hésita pas en son temps à faire le sujet d'un traité philosophique en déclarant qu'il s'agissait d'une «mécanique plaquée sur du vivant». En quoi il voulait dire que, dans le contexte de la vie sociale, on attend de chacun de nous qu'il se comporte fluidement et sans à-coups comme si jouer tel ou tel personnage était un effet de la nature prédestinant chacun à y faire preuve de 'naturel' (ainsi, le «Serveur de Café» sartrien apportant un demi en terrasse avec des grâces de danseur) ; ce qui déclenche un rire irrésitible consistant, alors, en tous ces petits grippages du ballet bien rôdé de la Vie_Sociale où, d'un seul coup, se met en évidence qu'il n'y a jamais là que la 'mécanique bien huilée' de la 'Comédie_Humaine' dont un rouage qui coince vient de révéler toute l'artificialité conventionnelle. C'est-à-dire que tout rôle est toujours forcé.

Pensons à une scène de théâtre noble, où l'héroïne en pleine déclamation pathétique de type :

le ciel n'est pas plus pur que le fond de mon cœur

accompagnée comme il se doit d'un mouvement d'avancée_oblative de tout le corps vers la visitation de la pureté céleste, s'entraverait en marchant de l'avant sur le pan de sa robe traînante pour s'affaler de tout son long sur les planches (en illustrant de manière risible la règle pascalienne : «Qui veut faire l'Ange, fait la Bête»).

L'illustre Siegmund Freud dans ses croustillants ouvrages sur la «Psychopathologie de la vie quotidienne» ou «Le mot d'esprit et ses rapports avec l'inconscient» (que le petit macomaniac bouquinait en douce dans les cours de philo au lieu de prêter attention au Ballet Aérien de la Procession_plotinienne) montre excellemment que tout est une affaire de contexte de départ, lequel fournit le dispositif scénique, pour que le génie pervers de l'Inconscient trouve un espace opportun où placer une de ses facéties. C'est l'effet contrapuntiste d'un contexte plein de decorum qui fait tout le sel de la rouerie de l'Inconscient, lequel introduit avec esprit un minuscule accroc dans une scène capable, pour peu qu'on y prête attention, de renverser complètement les valeurs.

Comme l'ami pauvre narrant avec emphase à un tiers sa rencontre à l'improviste avec un ami_de_vingt_ans devenu riche et laissant échapper un :

il m'a traité d'une façon toute famillionnaire

où l'Inconscient profite de la vantardise explicite (avoir une relation familière avec un grand de ce monde) pour y incruster risiblement l'aveu d'un traitement condescendant (le millionnaire qui prend de haut le ver de terre).

En hommage donc au principe de la Récitation_Powerdienne qui n'a jamais à être longue comme les dissertations du sieur macomaniac (lequel s'écoute parler, reprochèrent certains habiles à détecter l'écho produit par les déplacements d'air dans le vide des calebasses crâniennes :D) - voici donc un petit exemple :

Adam s'ennuyait fort en célibataire du Paradis. S'avisant qu'il y avait long comme lacune dans le Meilleur des Mondes, Dieu décida de lui adjoindre une compagne de la côte afin qu'il fassent voile de conserve. Après scrutation de cette Ève destinée à parfaire son bonheur, Adam ne put s'empêcher de s'enquérir :

Pourquoi donc, Seigneur, ce cou si près du tronc?

♋︎
 
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