Effectivement, vous n'êtes pas forcément au courant du métier que j'exerce pour gagner ma croute.
Je vais donc me révéler ici.
Professionnellement, j'interviens en tant que régisseur dans le milieu audiovisuel.
Métier consistant à assurer la logistique.
J'exerce essentiellement en longs-métrages (souvent), téléfilms (rarement) et publicité (beaucoup - honte à moi, je travaille pour le grand capital, mais c'est très bien payé, alors je ravale un peu de mon amour propre).
Pour résumer, je m'occupe de permettre à tout un chacun d'être logé (s'il y a lieu) et déplacé, d'avoir le matériel nécessaire, de décrocher toutes les autorisations utiles et nécessaires, d'assurer que chaque journée se passe le mieux possible.
Dans les faits, je m'occupe de donner toutes ses chances de réussite au projet, tout en m'assurant que ça ne se fasse pas au détriment des endroits où l'on tourne (oui, monsieur, j'ai bien compris ton intention, mais je ne vais pas bloquer tout un quartier pour que tu le fasses - tu me feras donc le plaisir de réfléchir la chose autrement).
De manière anecdotique (sans que ça ne soit réellement anecdotique), en tournage (dès lors toute la logistique est calée), je réponds aux trois questions éternelles.
- où est-ce que je me gare ?
- où est la machine à café (de longue date, c'est à peu près l'un des seuls métiers où, toute la journée, nous assurons, gratuitement, un service de bouffe permanent - hors repas - du plus simple : café, thé, eau, viennoiseries; au plus fourni : sodas, petits sandwiches, sucreries,...) ?
- où est-ce que je peux faire caca ?
Quand le boulot est bien fait, la journée ne consiste plus qu'à gérer les imprévus.
Pour parfaire la description, j'ajoute que je suis ce que l'on appelle un "intermittent du spectacle".
Et je profite pour dire qu'il ne faut pas croire ce qu'il se raconte à chaque occasion où les divers décideurs veulent tuer ce régime chômage particulier.
Non, nous ne sommes pas les chômeurs les mieux lotis de France (oui, parce que, malheureusement, il est rare que nous réussissions à travailler 11 mois par an - ce qui nous oblige à chômer le reste du temps).
Nous devons, tous les ans, travailler un certain nombre d'heures, pour avoir droit au chômage (valable un an, uniquement).
Les années maigres, il n'est pas rare de ne pas avoir assez travaillé et, du coup, de perdre le chômage.
Sur ce film en particulier qui était un énorme bouzin, un seul homme ne suffit pas pour gérer tous les aspects du tournage.
Nous étions donc plusieurs, chacun sa partie.
Je m'occupais, moi, de gérer les transports de chacun, de gérer le matériel (location permanente, location ponctuelle et transport), de gérer le bien-être de l'équipe et des acteurs (en tournage et hors tournage), de gérer les locations de véhicules (VL et PL), de gérer l'aspect financier (uniquement contrôle et validation : frais de mon équipe, factures inhérentes à la logistique - la partie purement financière est suffisamment complexe pour être confiée à un service à part) et de gérer mon équipe au quotidien (tâche à accomplir et planning horaire à respecter).
Quand je parle de gros bouzin, il faut savoir que sur ce projet, il y avait une moyenne de 110 personnes (technicien et acteur) chaque jour (rien que mon équipe, logistique et transport, nous étions 18).
De plus, même s'il s'agissait d'un tournage en France, nous étions sous le coup des habitudes de tournage des productions allemandes. 10 heures de tournage effectif par jour (préparation, repas, rangement et heures supp éventuelles non compris), ce qui te fais facilement du 14 ou 15 heures de boulot (en France, pour un tournage français, la convention impose un maximum de 8 heures de tournage effectif).
Ça t'oblige à une certaine gymnastique sur la gestion horaire des techniciens (histoire de ne pas être dans l'illégalité avec la loi française). Le nombre d'heures effectuées par les acteurs (sauf les acteurs mineurs), en revanche, on s'en cogne. Ils sont payés au cachet (qu'ils viennent 2 heures ou 20, c'est le même tarif).
Voilà, vous savez à peu près tout.
PS : vous m'excuserez d'avoir été, encore une fois, un peu long.
Sans compter les fautes d'orthographe...