Le labo de PVPBP

J'assemble avec l'excellent PhotoMerge inclu dans Photoshop, j'ai déjà monté un super panoramique de 20 full résolution 16 Mpx avec 2 couches en hauteur et il m'a pondu le truc sans erreur ou raccord pourri… mais ça a pris près de 35/40 mn sur mon iMac 24' DualCore. :p
 
Prenez cette photo accrochée aux cimaises par SirDeck naguère :

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- la regarder m'engage dans un vertige lié à la construction d'un 'champ visuel paradoxal'.​

Carrée et monochrome, avec un motif centré géométrique et une ligne médiatrice, la photo s'offre comme une toile peinte qui ne me fait voir 'que du bleu' : moi qui la regarde, je ne suis nulle part, et ce qu'elle me montre est un plan de couleur vertical qui refuse au regard le droit d'entrée.

Et pourtant... Ce cadre carré m'affecte d'un 'effet de hublo' : moi qui regarde, je dois être dans une cabine d'où je scrute un paysage. Paysage il y a, par 'effet d'horizon' : en direction d'une limite horizontale outremer qui porte une voile deux vagues marines créent un mouvement de rouleaux, lequel s'empare du plan rectangulaire inférieur pour le coucher en profondeur vers l'horizon ; tandis qu'une luminosité azurée qui se fonce dans la partie supérieure produit un effet d'éclairage par une source 'ultra-marine' dissimulée derrière l'horizon de la mer et en-dessous de lui.

Pourtant, la texture de l'eau montre des effets de strates érosives, comme si l'animation de la mer était pétrifiée. Et cette voile, posée en pein milieu de la ligne outremer d'horizon, quasi solide par la densité de son bleu, elle n'avance pas, c'est certain, car elle est exactement sise au point-limite du monde : ce milieu de la dorsale incurvée de la mer où les Anciens s'imaginaient que s'arrêtait la Terre, pour laisser tomber les eaux de l'océan à la verticale d'un gouffre dissimulé par l'horizon. Ainsi, la voile est suspendue, immobile, juste au bord qui sépare le Monde parcourable de l'Aiôn : l'Outre-Monde.

Cette 'mort retenue' n'a rien d'angoissant. Car n'émane pas de l'Outre-Mer une puissance des Ténèbres, mais rayonne au contraire une luminosité azurée, dont l'effet de nimbe incurvé autour de la voile repousse les ombres au loin vers le haut. Ainsi, si j'étais passager du bateau, en ce milieu rallié de la limite du Monde, je pourrais voir la Clarté opalescente qui rayonne par-delà la chute de cataracte des eaux. Je serais Arthur Gordon Pym atteignant la Blancheur au bord de l'Océan.

Mais l'effet de hublo de la fenêtre carrée m'interdit d'être là-bas, au bord du Monde, car je suis ici, dans cette cabine d'où je regarde le lieu-limite où je ne suis pas, mais dont la présence m'accorde un don : celui de pouvoir m'imaginer avancer vers la frontière de l'expérience. Une Odyssée du rêve en direction du point natal m'est donc offerte sans mesure d'espace

Ce toit tranquille où marchent des colombes
Entre les pins palpite entre les tombes
Midi le Juste y compose de feu
La Mer, la Mer toujours recommencée
Ô récompense après une pensée
Qu'un long regard sur le calme des Dieux


(Paul Valéry - «Le Cimetière Marin»)

...

Le vent se lève!... Il faut tenter de vivre!


car un effet diffus de brume m'avertit que Midi s'incline vers le soir
 
Bon, c'est une expérimentation : soleil quasi de face, photo au iPad, joujou avec iPhoto et les boutons à fonds...
Mais j'adore le résultat.
(t'façons, y a plus personne ici, si ?)

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Réactions: Powerdom et albert-r
Cette dernière mérite sa place dans "Les cimaises" (qu'est ce qu'elle fout ici, sérieux ?) :up:
(jp tu trous le cul ! souvent !)
 
J'ai ouvert ce matin à la porte du Labo_photo de MacGénération, sans rencontrer de traces d'activité récente. Pourquoi ne pas voler l'occasion d'un de ces exercices de la rêverie que j'affectionne avant que le jour ne se lève? - me suis-je dit, et voici qu'en allumant le rétro-projecteur s'affiche contre le mur la reproduction de cette photo accrochée par SirDeck aux «Cimaises» il y a déjà quelque temps :

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Comme une photo de 'Marine' que j'ai commentée naguère, celle-ci offre une symétrie géométrique alliée à un dépouillement du motif qui induisent un puissant effet d'abstraction : format carré et motif centré sur un fond monochrome. Et curieusement, à l'instar de la photo de 'Marine', il semble que cette image s'adresse directement à mon regard pour lui imposer un renversement de ses perspectives courantes. En le contraignant à voir à la verticale ce qu'on n'aperçoit en tant que quidam qui se promène qu'en regardant à ses pieds : le plan horizontal d'une dalle de béton.

Quand je regarde à mes pieds, d'habitude, spécialement dans un milieu urbain qui me soustrait à la dimension de la Terre, je ne peux pas dire que je découve un horizon non plus qu'une profondeur substantielle (comme Gaston Bachelard aimait à la prendre pour support de rêveries de son imagination) - non, ma vue s'écrase d'en haut contre une surface dure et inerte.

Mais justement voici qu'un miracle a lieu qui, d'un seul coup, me dépouille de ma verticalité d'adulte, et me rappelle à ces fascinations de l'enfance qui partage avec les chats les reptations microscopiques à même le sol : une tache d'humidité qui occupe le centre même du carreau et une brindille venue fortuitement s'y superposer marient leurs hasards pour donner lieu à une alchimie_de_l'image.

C'est un arbre qui se dresse, là, avec cette abstraction simple des dessins de l'enfance, où les troncs sont des bâtonnets et les feuillages des contours de nuages. Oui, il se dresse à la verticale, cet arbre de l'enfance retrouvée, et le support horizontal de la dalle est bien obligé de suivre le mouvement : c'est un horizon qui surgit, doux et cotonneux comme lorsqu'un temps de neige fait disparaître le monde et ne présente plus que l'atmosphère de brume enchantée d'un Noël, nocturne et lumineuse à la fois. Une particule ocre figure la Lune à côté de l'arbre, et d'innombrables étoiles composent avec des flocons ce Pays_Magique où tout est proche et où tout vous attend.

Il n'y a plus qu'à s'avancer dans ce paysage qui s'offre : le Pays_de_la_Promesse. Quelle merveille! Une surface horizontale opaque et dure, qu'un simple dessin fortuit transfigure, pour y ouvrir la profondeur d'un paysage constellé dans lequel vous êtes convié à vous avancer. Cette traversée des surfaces qui se transforment en portes du jardin : c'est le pouvoir de métaphore de l'image - le transport euphorique par lequel l'imagination, redevenue faculté maîtresse de l'esprit, fait s'avancer l'enfant dans l'Ouvert.
 
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