Giam_ a dit:
Et moi je ne comprends pas pourquoi ça : (Si quelqu'un peu m'expliquer)
hihihi !
Oh ! c'est facile à expliquer. Allez, je tente :
"- voilà, il faudrait moderniser l'image du Crédit Lyonnais, parce que vous comprenez, le Crédit Lyonnais d'aujourd'hui, ce n'est pas du tout la même entreprise que le Crédit Lyonnais d'hier (sous-entendu la banqueroute)
- oui, nous avons bien compris. voici ce que nous vous proposons : un sigle. Pourquoi un sigle ? parce que c'est "contemporain", moderne, c'est rapide [edit : Karambolage sur Arte avait fait un sujet sur les sigles en disant que c'était une spécificité française, tout du moins par rapport aux allemands. Cf BHL, PPDA, ANPE, ASSEDIC, etc ], ça fait penser au langage SMS, les jeunes adhèrent.
- ah oui, c'est pas mal, j'achète. Et la couleur ?
- Bon, on vous a pris un bleu parce que c'est tout de même la couleur "sérieuse", celle des affaires, celle du business. On a mis un jaune pour le sigle pour rappeler tout de même l'ancienne structure, pour que les gens ne soient pas tout à fait dépaysés...
Quant à l'éllipse, voyez-vous, c'est pour donner un côté concret au logo, il apparaît métallique, ça peut faire penser à une pièce de monnaie, c'est sérieux, solide, c'est banque quoi. Et puis c'est dynamique, non ?
Et pour la typo du sigle, on a subtilement fait un mix qui fait tout à fait moderne, remarquez que nous utilisons des courbes et des angles droits, il fait ciselé, c'est créatif, c'est original !
- ah oui, c'est tout à fait bien. Merci beaucoup."
En fait, dans ce dialogue, j'ai zappé tout la partie de préparation à l'agence (qui peut donner "-le graphiste : "chouette ! on refait le crédit lyonnais, allez on gomme tout et on tente un truc clean-carré, c'est parti !" -le directeur : "hola mon coco, t'excite pas, tu les connais pas, on va jouer la sécurité, tu vas foutre du bleu déjà, ensuite tu vas me trouver une forme sympa, tiens pourquoi pas un ovale, j'avais fait ça en 87, ça a très bien marché, et puis ensuite un jaune, pour l'historique" - le graphiste : "?!
oké..."), et bien sûr toute la partie de négociation avec le client ("on a fait un pré-test sur les salariés du groupe et il est apparu qu'ils aimaient bien la nouvelle Clio")
(perso, je trouve que le mec qui a bossé sur le site s'en est plutôt bien sorti. dans l'intégration de cette putain de piécette dans un bandeau. ça marche pas mal. ça se voit mieux ici :
http://particuliers.creditlyonnais.fr/epargne-et-placements/premier-compte/)
So :
? Boah, ne blâmons pas (trop) les graphistes qui pondent des crottes (dac avec Passenger66)
? mais n'hésitons pas à blâmer les clients
(en fait, pas exactement les clients, mais les décideurs. parce quand on est graphiste pour une banque mettons, le client n'est pas le directeur de la banque, mais les clients de la banque. Et que disent les clients de la banque ? ils disent rien, ils s'en foutent. Parce que la vraie offre de la banque c'est pas son logo, mais ses services financiers. Dès lors on peut proposer n'importe quoi, et pour justement ne pas proposer "n'importe quoi", on s'en remet à ceux qui savent, à ceux qui ont un avis sur la question (quelle question ? ben la question du dessin du logo), c'est-à-dire les designers.)
quelques reflexions :
chez les british, quand ils veulent faire du neuf avec du vieux, ils mettent "new" devant.
ça donne :
New Labour
New Scotland Yard
c'est simple et ça fonctionne. Je trouve.
le mot "faire", je crois que c'est le témoignage d'une mauvaise méthodologie :
"ça fait moderne", "ça fait vieux", "ça fait jeune".
quand un client commence à dire qu'il veut "faire", ça part mal.
Donc, essayer de résoudre la chose en demandant au client "ok, vous voulez "faire x". Mais êtes-vous "x" ? Et ne pensez-vous pas qu'il faudrait plutôt aller dans le sens de ce que vous êtes et pas dans le sens de ce que vous voulez paraître ?" (Hm, j'ai pas tous les mots pour expliquer mais vous voyez ce que je veux dire... "mieux vaut-il faire ou mieux vaut-il être ? si vous me répondez "faire", alors on va faire de la publicité mensongère.")
Normalement, quand on dessine un logo (et quand on le choisit), on devrait être guidé par des considérations plastiques seulement (donc exit le "faire").
Par exemple, voici un logo qui, je trouve, a été fait dans une réelle approche plastique, dans une réelle reflexion sur la forme (démarche qui a été tenue jusqu'au site, incroyable).
www.bg-group.com
Ici, on a dessiné une forme, on s'est demandé comment faire une forme simple avec un B et un G.
Alors que là (
www.gazdefrance.com), oh non ! une recherche plastique n'était pas suffisante, (ou alors trop abstraite), il fallait "faire sensuel", "faire chaleureux", "faire vivant", "faire humain".
En fait comme d'habitude, le choix d'un logo se fait sur des a priori :
" les gens (sous-entendu "les français") ne vont pas comprendre, il leur faut du sympa, il leur faut des images, il leur faut Astérix ! Tiens voilà, je veux Asterix ou Johnny Hallyday sur mon logo. Vous pouvez ?"
Ahlala, c'est un débat sans fin...
(moi je suis pas exempt de toute critique sur certains de mes tafs non plus, je me la joue pas)
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Merci à Zigouiman pour sa recherche sur la charte de la poste (hop ! in my dossier des documents de charte)
Pour Passenger66 : bah on est d'accord, on est tous d'accord, tout le monde est d'accord avec tout le monde. Soupir... :rolleyes:
sur "soumis à des contraintes de marché", là, je ne suis pas tt à fait d'accord.
les mauvaises manières des décideurs (on y met pas mal de trucs là-dedans : mauvais goût, decisions nulles, absence d'audace, absence de recul, affirmation crétine de savoir ce que "veut" le public visé, non respect du dessinateur de logo), c'est plutôt une perversion de certains acteurs du marché. C'est tout.
Parce que les contraintes sont pas là : elles sont techniques les contraintes, et elles sont artistiques (= dessin de la forme).
Elles sont pas politiques. Voilà, le truc en France, c'est que tout est politique ("je sais ce que les français veulent, alors vous allez faire comme je vous dis.")
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marre de me relire et de me demander si je post, allez, je post.
je veux bien quelqu'un qui me parle des marchés et de leur perversion (par exemple les marchés financiers et la dictature du court-terme)