supermoquette a dit:
C'est les tiens ? hum je voulais dire c'est toi qui as dessiné le drapeau ?
J'étais arrivé à Beyrouth quelques jours après l'attentat contre Rafic Hariri. C'était la cinquième fois que je venais à Beyrouth et je me sentais plutôt en confiance malgré les événements. Le personnel de l'hôtel Albergo où je descends d'habitude était heureux de me voir arriver compte tenu des événements. J'ai fait mon boulot pendant quelques jours. J'ai aussi passé du bon temps le soir et le week-end à sortir rue Monod ainsi qu'au B018 et à jouer au soleil avec les enfants d'un couple d'amis au yacht-club. Un soir nous sommes partis dîner pas trop loin de mon hôtel, du côté d'Acharafieh. Le lendemain (27 ou 28 février je ne sais plus) un vote de défiance devait avoir lieu contre le gouvernement pro-syrien d?Omar Karamé. Sachant que le parlement voterait la confiance une grande manifestation était prévue à deux pas du parlement, place des Martyrs, où reposait la dépouille d'Hariri. Ayant eu vent de cette manifestation, la veille, un dimanche je crois, le gouvernement avait fait interdire l'accès à la place. Dans la soirée alors que je buvais un verre avec des amis libanais, des jeunes sont venus nous débaucher, drapeaux au cèdre en bandoulière : "Il faut descendre maintenant, demain la place sera fermée". Bien entendu nous sommes descendus. Arrivés près de la place des Martyrs, des soldats barraient déjà le passage (il devait être une heure du matin) mais l'un d'eux nous a très vite indiqué qu'à cent mètres sur la droite il était encore possible d'y accéder
Nous y sommes donc allé. Il y avait déjà plusieurs milliers de personnes assises avec des bougies chantant des chants très doux. Catholiques, maronites, chiites, sunnites, qu'importe. Nous nous sommes joints à eux et sommes restés là à méditer et observer. Environ deux heures plus tard je devais retourner à l'hôtel récupérer mes bagages et un taxi pour me rendre à l'aéroport. J'ai donc laissé mes amis là avec une pointe de regret. C'était vraiment une belle nuit.
Arrivé 8 heures plus tard, dans la matinée, j'écoutais la radio dans le taxi me conduisait de Roissy à Paris. En ouverture du journal d'Inter : "Le gouvernement pro-Syrien du Liban est tombé devant la pression populaire". Quelle joie j'ai ressentie à ce moment là!
Je ne souhaite pas exprimer d'avis quand aux conséquences politiques de cette douce révolution pour le Liban et pour le Moyen-Orient, mais d'avoir vécu de cette façon une telle nuit et les événements qui l'ont précédée resteront pour toujours gravés dans ma mémoire comme l'une des plus belles nuits que j'ai vécue.