Je garde à l'esprit un cliché de
SirDeck posté il y a quelque temps dans ce fil. Sans parvenir à résumer l'impression curieuse qu'il a suscitée en moi. Voici l'image :
Il y a quelque chose de patiné, d'un peu vieillot, dans cette image, qui déclenche une émotion liée au temps : je regarde cette scène comme appartenant à du passé. Un passé ressuscité, là, devant moi. À la manière d'un souvenir des autres.
Immobilisés dans le temps : l'instant de la pose pour une photo-souvenir.
Tableau burlesque, délirant même : pas moins de huit figurants alignés (une jeune mère, six enfants dont un en bas-âge, sans oublier le chien) en train de poser pour le photographe, qu'on imagine le père de famille et conducteur de l'automobile.
Neuf personnages qui doivent bien réussir à s'entasser dans cette voiture bourrée de bagages, dessus et dedans.
L'empilement héroïque des migrations. Les plantes à l'allure exotique du bas-côté de la route, le bateau de plaisance, l'allure décontractée des figurants me font penser à ces photos d'archives de congés-payés. Scène de voyage de vacances, qui soustrait la voiture familiale surchargée - une
Ford Wagon ? - l'arrière écrasé au sol, l'avant relevé comme une étrave symétrique de celle du bateau matérialisant l'élan des départs, à la connotation des exodes forcés.
J'ai du mal à imaginer SirDeck en pater-familias photographiant cette tribu. L'un des protagonistes enfants du tableau, alors ? Revisitant après coup ce cliché paternel où il figure, comme le peintre
Velásquez se présentant dans la scène de groupe des
Ménines en personnage d'un tableau vu par les yeux du Roi.