De temps en temps, j'ai ca a la maison. C'est moins fatiguant, il y a moins de poussière et je ne suis pas obligé de partager. Pas besoin d'avoir les oreilles qui vrombissent et la chemise qui pue la merguez, de montrer d'un oeil complice à mes contemporains que je les trouve sympas alors qu'au fond -dans le meilleur des cas- ils me laissent indiférents. De toute façon, j'ai horreur des manifs, des partis, des nanas qui montrent leurs seins pour exprimer leur désaccord et pensent (?) que l'exposition de quelques décimètres carrés d'épiderme sont une condition impérative pour être entendues. De plus j'ai horreur de la ségrégation, et cela en est une: si je montre mes mamelons, qui va me regarder, ou/et m'écouter, moi?!
mais je prends note: la prochaine fois que je suis en incompréhension monétaire (!) avec un de mes employeurs, je vais lui affaler mes couilles sur la table de réunion. Je suis sûr que nos rapports s'en trouveront facilités et que ce magnifique et mouvant support de ma rebelion m'évitera de chercher des arguments de toute façon inutiles car je ne suis pas le plus fort: c'est lui qui me paie pour que je puisse acheter ses produits, ou ceux dont il fait la pub. Bon, je m'égare.
La créativité, pour reprendre ton terme, et qui dans le cas présent ne représente que 0,1% des manifestants n'a jamais été une profession qui te permet de discuter d'égal à égal avec ton banquier, ou alors cela s'appelle "une parfaite réussite fondée sur une approche marketing démagogique" : l'artiste n'a jamais fait le marché de l'art.
Si on veut etre à l'abri on ne fait pas ce taf, on entre dans la fonction publique ou dans une multinationale aux reins solides et cela devient un hobby. On pyrograve des ronds de serviette, on déclame du Robert Desnos sur une scène lors de la fete de l'école, on aquarelle les ports bretons, on écrit un blog.
On ne demande pas aux autres de financer ses recherches artistiques, ses errances littéraires, ses délires picturaux (que personne ne comprend mais que la société SE DOIT de sponsoriser sous peine d'etre taxée d'assasinat intellectuel), les employés que l'on ne contraaduréeindétermine pas, simplement parce que l'on a une structure qui entre dans le cadre de ce que l'on nomme dans les plaquettes administratives "artistique".
Le financement de l'art, qu'il soit par l'Assedic ou un fabriquant de yaourt 0% est une perversion, et l'exiger en piétinant dans la rue est un scandale : aide n'est pas assistanat. Et là, tu remarqueras que je parle d'art : pas du machino ou de l'assistant du porteur de sandwiches, meme si il le font artistiquement!
Et merde : je suis comme eux, moi! travailleur indépendant qui ne sait pas si dans deux mois il aura du taf! Parce que je n'ai pas de T-shirt avec marqué "artiste" dans le dos il faut que j'accepte de fermer ma gueule? je n'ai meme pas droit au chomedu!
Ou alors je me trompe lourdement, j'ai totalement tout faux: ils ont raison. Mais il faut me l'expliquer calmement, gentiment: me dire pourquoi.