Thème :
" En route vers l'inconnu "
Mots obligatoires
- diminué
- oxymores
- espoir
- anxiété
- projet
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En rhétorique, un
oxymore ou oxymoron, est une figure de style qui vise à rapprocher deux termes que leurs sens devraient éloigner…
C’est ainsi que je me figurais cette liaison avec cette fille bizarre rencontrée à la Médiathèque. J’étais sur un bout de table, étudiant de près une édition originale de « Chanteclerc », le fameux Coq d’Edmond Rostang. Guitry, premier titulaire du rôle l’avait dédicacé d’un trait de plume rageur : «
Sacha G. qui n’en peut mais de faire le Coq ! »
Elle s’approcha de moi, regardant par dessus mon épaule le titre de l’ouvrage :
- Quel est donc votre
projet ? Heu… si je ne suis pas indiscrète ?
Quel timbre de voix elle avait ! Mon Dieu, un ange se tenait sans doute derrière moi..
- Je cherche la recette du Coq au Vin, tel que le préparait l’aubergiste pour Cyrano de Bergerac (j’en suis également originaire…), et de livre en livre j’en suis arrivé à cette histoire de Nocturnes jurant la fin du Coq qui les réveille en plein jour !
C’est alors que je sentis sa main flatter mon opulente crinière et plein d’
espoir, sentant mes sens s’échauffer, je me retournais lentement pour découvrir son visage. J’avais déjà des vues sur elle avant de l’avoir observée :
Une véritable Madone se tenait près de moi et quand je me levais soudain, son haleine enchanteresse balaya mon visage !
La folle
anxiété qui me saisit alors fut de brève durée :
- Puis-je vous proposer une soirée sympathique et vous faire découvrir les talents d’un grand cuisinier périgourdin ?
Comme l’établissement en question est fermé ce soir, je demande au Chef (un vieil ami…) de me préparer une marmite de son plat vedette, le coq au vin, que j’apporterai chez vous et que nous dégusterons ensemble ?
Voyez vous mon appétit n’a guère
diminué, bien au contraire en vous observant !
Troublée, elle acquiesça, et caressant de nouveau mes cheveux, elle murmura
- Voici mon adresse, venez vite, je vous attends !
Mon
projet était simple : la mettre très vite à mon tableau de chasse, comme le fait tout bon coq qui se respecte !
Tout se fit en quelques instants, un saut chez mon ami restaurateur, la cocotte mise en un panier bien enveloppée de torchons pour qu’elle restât chaude, un passage rapide à mon domicile pour prendre du vin et la poudre magique qui devait assurer mon succès !
Elle serait à moi et à moi seul !
Je m’arrêtais devant sa porte et déposais le panier, découvrant un instant la marmite pour y verser le contenu de mon flacon, puis je sonnais, et m’éloignais aussitôt. Je me dissimulais derrière la haie et l’observais à travers la grande baie vitrée de sa salle à manger : le couvert était déjà prêt pour deux, d’admirables chandeliers d’argent éclairaient la pièce !
Elle ouvrit à mon coup de sonnette, regardant étonnée de ne pas me trouver là, et voyant le panier ,le prit et rentra chez elle.
Elle s’installa rapidement seule à table, souleva le couvercle et huma d’un air extasié le fumet qui se dégageait du plat.
C’est ainsi que je la vis mettre en bouche la première cuillerée de cette délicieuse sauce que j’avais déposé sur le pas de sa porte, avec une bouteille de Château Canon-La-Gaffelière, grand-cru classé de 2005, avec un petit mot : «
Commencez sans m’attendre, pendant que c’est chaud ! »
Je n’attendis pas plus, fis demi-tour et en passant je déposais discrètement mon flacon dans la première poubelle venue, jettant un dernier regard à l’étiquette : «
Amanita virosa siticulosa ».
.... Je retrouvais vite mon amant, qui m’attendait un verre d’armagnac à la main...