[
]cet étalage d'hommages dans le monde entier me met mal à l'aise. Car derrière l'hommage à l'homme et au créateur, on a le sentiment qu'Apple n'est rien sans Steve Jobs. Il y a un côté gourou qui me gêne.
Mais Apple, c'est 40 000 salariés, qui ont pour beaucoup du talent à revendre et surtout un boulot et un salaire à garder. J'aimerais bien que la mort de Jobs n'ait pas de conséquences néfastes pour ces travailleurs.
Par ailleurs, je ne veux pas plomber l'ambiance car je sais qu'il est malvenu de dire du mal des morts, mais les propos de l'ancien dirigeant d'Apple France me font froid dans le dos : «Steve Jobs a mis des personnes mal à l'aise et il en a fait pleurer», a confié Jean-Louis Gassée, ancien dirigeant d'Apple France, au magazine Fortune. «Mais il avait raison presque à chaque fois, et même lorsqu'il avait tort, il apportait une telle créativité que cela demeurait étonnant. Les démocraties ne font pas de superbes produits. Vous avez besoin pour ça d'un tyran compétent.» (source : Le Figaro)
Je ne suis pas certaine qu'il s'agisse là du plus bel hommage qui soit...
En tout cas, ça renvoie à l'image du patron tyrannique, le genre de tyrannie prétendue nécessaire pour obtenir le meilleur des gens. Comme si la politesse et le respect avaient empêché la créativité... Comme si, derrière l'innovation technologique joliment présentée et intelligemment vendue, ne se cachait pas, comme dans toutes les grosses entreprises, l'exploitation des sous-traitants, la pression des salariés tenus au secret comme si l'iPad méritait le secret défense, le matériel lambda fabriqué à bas coûts et vendu à prix d'or...
Alors oui, je rends hommage au visionnaire qui a su trouver les arguments commerciaux pour me faire acheter quatre Mac (ce que je ne regrette absolument pas), mais il y a tout un aspect non négligeable du personnage et de sa fonction que je ne veux pas oublier. Par respect pour ceux qui restent, les anonymes, qui vont continuer de se creuser les méninges pour nous vendre les joujoux et outils high-tech de demain.