John Zorn Domaine privé
Essential Cinema
25 juin 2008_ 20 h.
Essential Cinema s'inscrit dans la série des
Filmworks (19 opus), collection de musique de film et de bandes sonores à partir de nombreux films expérimentaux.
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Electric Masada
Marc Ribot_
guitare
Jamie Saft_
claviers
Erik Friedlander_
violoncelle
Trevor Dunn,
basse
Ikue Mori_
électronique
Joey Baron_
batterie
Kenny Wollesen_
batterie
Cyro Baptista_
percussions
John Zorn_
direction, alto saxophone.
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la salle est un théâtre à l'italienne version contemporaine.
je suis idéalement placé, au balcon et au milieu...
pour le concert de ce soir, il y aura deux registres et deux niveaux de regard: la scène et l'écran, le haut et le bas.
en haut, le balcon et les alcôves en places assises.
en bas, la salle aura été " évidée" pour ressembler à une salle de concert.
en bas, les gens sont debout.
au-dessus de la scène, un écran géant nous rappelle que nous allons assister à un ciné concert.
donc, cinq courts-métrages rares issus du cinéma expérimental.
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Rose Hobart. (1936_1939)
de
Joseph Cornell.
ce film est considéré comme un chef d'oeuvre du cinéma expérimental.
travail de remontage et de réagencement d'un film d'aventure de 1931 se situant à Bornéo.
à partir de la matière filmique et uniquement des plans où apparaît Rose Hobart, comme un "concentré" amoureux, Joseph Cornell va remonter le film sans respecter la linéarité du récit, en jouant du faux raccord et du cut-off.
historiquement, Cornell (plus connu pour ces "boîtes") inaugure le film de montage qui inspirera toute une dynastie de cinéastes allant de Stan Brakhage et Jonas Mekas en passant par Godard, Chris Marker ou Artavazd Pelechian jusqu'à Matthias Müller et Chrisoph Girardet.
bon, même comme cela et malgré les intentions et l'
aura que trimballe le film, ce remontage sera et restera aussi insipide et ennuyeux que le film lui-même.
sauf que, là, il y a Zorn. en plus.
la musique de Zorn.
et ce faux film en noir et blanc (virage et dominante bleu avec rayures et scratches) sera magnifié, le temps d'un soir, par les recherches atmosphériques et bruitistes d'un Masada Electric tout en retenu minimaliste.
le film devient soudain oppressant. on redoute dans cette attente impossible (une femme attend quelqu'un) des accès de violence, des débordements sans nom, des formes inédites de transgressions et de meurtres...
le film (et Electric Masada) repose entièrement sur le jeu de Marc Ribot (guitare): imprévisible, inventif, envoûtant, génial... hors norme.
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Aleph. (1956_1966)
de
Wallace Berman
dans la lignée d'Allen Ginsberg et de la Beat Generation, l'unique film du peintre juif Wallace Berman à partir de la première lettre de l'alphabet hébraïque.
un collage inventif fait d'images vertigineuses (corps et visages) en noir et blanc et peintes directement sur le support 8 mm (traces colorées).
en background et en duo: le sax alto furioso et bruitiste de John Zorn himself et la rythmique accélérée de Joey Baron aux drums (comme au bon vieux temps de Naked City) sur fond de basses (Trevor Dunn).
on aimerait parfois que les images aillent encore plus vite dans une sorte de "gorgeous éructif"...
un grand moment de pure virtuosité et de décalage et d'invention et de folie...
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Oz: The Tin Woodman's Dream. (1967)
de
Harry Smith
long-métrage d'animation inspiré par le" Magicien d'Oz" (projet inachevé).
la séance se termine par un montage kaléidoscopique de séquences tournées en 1966 pour Film #16.
ces dernières images me font pensé à ces lunettes, en forme de longue-vue, qu'il fallait tourner pour voir le monde à travers le prisme déformé d'un kaléidoscope.
musique essentiellement percussive et minimaliste (avec Cyro Baptista aux percussions et Ikue Mori à l'électronique).
une forme d'onirisme aux formes organiques et sexuées.
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By Night With Torch and Spear. (1940)
de
Joseph Cornell
ce film de 8 mn, fait de collage d'images de fonderie et de métal en fusion et de nuages bleu foncé ne sera pas projeté...
ou alors je ne l'ai pas vu...
(non, je n'étais pas chimico-bourré).
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on passera direct à
Maya Deren avec
Ritual in Transfigured Time (1946).
s'il fallait parler de films purement expérimentaux, il faudrait, alors, parler du cinéma de Maya Deren, Jonas Mekas, Stan Brakhage, Kenneth Anger ou Michael Snow...
donc, Deren.
un film, en noir et blanc contrasté, avec des plans virtuoses, qui démarre sur des jeux de mains, un bal mondain et des corps en mouvement en extérieur paysage, pour finir dans l'onirisme. thématique un peu compassée dans la gestuelle...
séquences aux formes flottantes et sensuelles qui s'enchaînent sans logique narrative.
Zorn reprend le thème de "Filming", un morceau qui faisait partie d'un documentaire sur Maya Deren (Filmworks X).
le thème est superbe, envoûtant, répétitif...
et il a cette longueur et démesure du Live.
on aimerait, alors, que le film ne s'arrête jamais...
on aimerait que le temps se suspende à jamais sur cette séquence de temps...
on aimerait, alors, que la musique ne s'arrête jamais...
Maya Deren Ritual in Transfigured Time. 1946.
[youtube]xrWNXLPFz40&hl=en[/youtube]
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au premier rappel (il y en aura trois,) c'est un Electric Masada tout en subtilité chromatique qui ouvre le versus concert.
dans la foulée, il y aura un set d'anthologie, hyper déstructuré (dans la pure lignée des Live écrit au cordeau de Cobra ou des sets les plus déconstruits de Electric Masada) avec un Zorn en pleine forme au sax alto.
on repart sur les bases d'un Masada ultra-rythmé (deux batteurs et un percussionniste) remonté par un Zorn hybride, à la fois sax altiste et chef d'orchestre, ou plutôt directeur musical d'une précision redoutable et maniaque.
il faut le voir exprimer ses intentions dans une gestuelle ludique et rigoureuse et implacable.
Electric Masada Tekufah
[youtube]95DuKWyOSrs&hl=en[/youtube]
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c'est la fin.
malgré le battage, les lumière se rallument.
des gens commencent déjà à partir...
le groupe revient pour un set joué presque pleine lumière...
quelque chose comme un "Gift"...
(qui n'était pas prévu).
merci, monsieur Zorn.
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pour des raisons diverses et variées (plus de billets...), j'ai complètement raté le volet Paintkiller du concert de lundi (23).
la vision d'un Zorn plus proche de ce que j'écoute et du Zorn que je préfère (mais tout le monde s'en fout...) aux confins du Punk_Hardcore_Grindcore et Metal Death avec des pointes de Trash et de Noisy flirtant sur un genre nouveau, le Free Jazz Core.
Paintkiller One Eyed Pessary.
[youtube]OzvLZvc-haI&hl=en[/youtube]
Naked City Torture Garden.
[youtube]sBQDepf7sFA&hl=en[/youtube]
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pour les fans:
concert de John Zorn le 25 février 2009 à la
Salle Pleyel.
John Zorn et Tzadik
présentent la musique de Serge Gainsbourg
copie conforme de l'album
Great Jewish Music:Serge Gainsbourg.
avec une pléiade d'artistes de l'underground new-yorkais.
j'ai déjà parlé de cet album dans " Kelle musik écoutez vous donc ? 4.0 "
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