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@Human-Fly
Tu parlais de l'Europe et de l'Ukraine l'autre soir, j'ai depuis trouvé cet article :
The Russian invasion of Ukraine seems to have answered the question of the European order by reinstating the model, long believed to be history, of the Cold War: a Europe united under American leadership as a transatlantic bridgehead for the United States in an alliance against a common enemy...
americanaffairsjournal.org
C'est en anglais - mais facile à traduire - et ça donne à réfléchir sur le chemin où nous nous sommes engagés.
Ma modeste réaction à l'article "The EU after Ukraine"
Article long, riche, passionnant.
Tout particulièrement pour moi qui adore à bien des égards les États-Unis et le Royaume-Uni.
Pourtant, et vous lirez rarement ça de ma part, le passionnant point de vue développé dans l'article oppose de manière parfois un peu caricaturale les deux pôles occidentaux et démocratiques dans lesquels je me reconnais. Celui que je viens de citer, et celui que je considère comme mon pays: l'Europe.
Cette dernière, directement perçue par un prisme américain dans certains cas, ou plus indirectement en passant par le point de vue britannique, se retrouve parfois décrit avec un luxe inouï de détails, de références, de citations... Il est d'autant plus curieux que certains points pourtant essentiels soient au mieux effleurés, et abordés de façon laconique, au pire omis par légèreté, ou par manque de considération dans le pire des cas.
L'enthousiasme europhile n'est hélas abordé que sous l'angle de la caricature, car tout rejet de ce projet, ou même toute adhésion réservée, conditionnelle ou critique est aussitôt expédié au rayon ironiquement désigné sous le nom de "populisme".
Si toute aspiration européenne sociale, culturelle, etc est à peine survole, tout ce qui concerne l'économie est abondamment évoqué, au point que lire l'article sans recul ni sens critique pourrait laisser penser que l'Union Européenne se limiterait au marché unique, au très riche potentiel, mais parfois englué dans des contradictions presque insolubles.
Le paradoxe de cette Europe économique tiendrait dans sa volonté d'intégrer de plus en plus d'états dans l'Union, alors que les multiplicités culturelle, politique, économique se révélant chaque jour un peu plus rendrait l'entreprise de plus en plus improbable, ou condamnée à un succès incomplet et relatif dans le meilleur des cas.
Avec des arguments de qualité mais une sévérité à mes yeux bien excessive, l'article souligne par exemple les différences existant entre ces deux piliers de l'Union que sont la France et l'Allemagne. Le premier, très étatiste ( ou reposant sur la tradition d'un fort interventionnisme d'état), le second se situant dans une tradition de dialogue et de la recherche naturelle de la solution négociée, voire du consensus à tous les étages de la démocratie allemande.
L'Union veut intégrer de plus en plus d'états dans son marché unique, selon ses propres standards (modernes et libéraux en diable, en gros), et se heurte à de telles difficultés croissantes que l'échec était inévitable.
Le plus spectaculaire à ce jour étant le Brexit.
Là, l'article nous brosse presque une "belle histoire". La passion britannique pour le parlementarisme se serait trop souvent heurté à la rigidité de la bureaucratie européenne...
Comprenez plutôt que le cadre européen ne laissait pas au Royaume-Uni la marge de manoeuvre pour défendre ses propres intérêts économiques au mépris de toute autre considération... Ou presque.
Ce n'est pourtant pas faute d'avoir incessamment essayé d'obtenir le beurre et l'argent du beurre, non sans talent et parfois même avec succès.
Ici ma propre lecture de cette pseudo histoire d'amour s'étant mal terminée entre le Royaume-Uni et l'Union Européenne n'est pas foncièrement moins caricaturale, mais elle est toute autre, et plus triste.
Il s'agissait dès le départ d'un mariage de raison. En 1973, la motivation principale du Royaume-Uni pour intégrer l'Union Européenne était l'accès au Marché Unique, qui devait assurer la prospérité dde l'économie britannique. Et le présenter ainsi est encore assez aimable.
N'en déplaise à l'ironie de l'article à ce sujet, mais le Brexit est à mes yeux une sortie de route imputable essentiellement au populisme de l'époque, incarné par un Boris Johnson jadis europhile, mais plus brexiteur que tous dès qu'il fut question d'accéder au pouvoir et d'y rester... Un certain temps... "La maitrise de notre économie", "la maitrise de nos frontières" furent des mots d'ordres britanniques (entre autres, hélas... ) bien plus convaincants qu'une passion parlementarisme contrariée par la rigidité bureaucratique de l'Union.
Comprenez que pour les brexiteurs, l'Union coûtait plus cher au Royaume-Uni que ce qu'elle lui rapportait...
Mais le pire dans tout ça fut une certaine xénophobie, incarnée aux yeux des tenants du Brexit par une immigration incontrôlée en provenance de France...
En cas de la moindre difficulté, "always blame the French", comme disent les moins francophiles de nos voisins d'outre-Manche... À moins qu'il ne s'agisse d'une facilité rhétorique ou d'une forme d'humour locale... Mais je peine à m'en convaincre...
Et dans la foulée du Brexit, l'article annonce rien de moins que le très probable futur départ de l'Union de l'Italie (!)...
Soit il me manque des informations majeures sur l'état actuel des relations entre l'Italie et l'Union, soit ce qui me semble relever d'une extrapolation sauvage prête vraiment à sourire, ou le pourrait s'il ne s'agissait d'un sujet sérieux. Surtout aujourd'hui.
Autant nos amis britanniques, par ailleurs passionnants et charmants n'ont jamais eu la fibre européenne, autant je n'en dirais pas autant de l'Italie.
Et je perçois mal en quoi sa culture méditerranéenne constituerait un obstacle à son maintien dans l'Union.
Je me suis intéressé il y a quelques années à la crise grecque, et à ce pays maintenu à bouts de bras au sein de l'Union, ce qui faillit rendre folle l'Allemagne...
Sans être trop long sur le sujet, disons qu'à moins d'une très grossière erreur d'appréciation de ma part, lItalie, même endettée, voire mal gérée, reste infiniment plus riche et plus solvable que la Grèce d'il y a quelques années, où l'état et les services n'existaient pratiquement pas, où la corruption presque omniprésente était "complétée" par une économie grise selon laquelle l'immense majorité des transactions (y-compris immobilières, souvent, se faisaient en espèces, généralement sans rien déclarer à personne...
Si la Grèce, courageusement et avec l'aide de L'Union, a tenu bon, je ne vois pas pourquoi L'Italie quitterait l'Union...