Salut toi,
Ca fait un petit moment que je ne t'ai pas "parlé". Ca fera 10 ans l'été prochain...
Tu vois, ces promesses d'ados que l'on s'était faite, tiennent toujours. Je ne t'ai pas oublié. Je ne vois pas comment d'ailleurs, un bout de moi est parti avec toi et je conserverai toujours cette cicatrice au fond de moi.
Le temps passe, avec lui l'érosion, la disparition de ces sensations, souvenirs concrets qui s'effacent un peu plus chaque jour. Je ne me souviens plus de ton visage, de ton odeur, et de toutes ces choses que je ne voulais pas oublier. Elle sont pourtant parties.
Je ne souffre plus de tout ça, j'ai réussi à passer outre. Je sais juste qu'un bout de toi existe toujours au fond de moi, mais il est devenu flou. Est ce encore de l'amour, je ne sais même plus.
Il est des moments ou je repense à toi, à nous, à ce que nous avons fait, à ce que nous aurions aimé faire, mais il n'y a plus de tristesse totale. Juste le besoin de me souvenir, de me donner un petit sourire.
La vie a été très dure à poursuivre sans toi au début, j'y ai mis le temps. Je sais bien que parfois cette étape importante de ma vie est sensible. Et puis tu sais comment l'humain est fait, quand rien ne va, ou qu'on en a l'impression, on se raccroche aux souvenirs, pas forcément les plus joyeux.
Ce soir c'est un peu ça. Besoin de te parler comme si tu étais encore là, comme si la vie nous avait séparé autrement, sans rien attendre de particulier en retour, juste l'apaisement d'avoir dit ce que j'avais besoin de te dire.
Ce fut particulièrement lourd à porter comme douleur parfois ton départ. J'ai mis tant de temps à l'admettre, puis à l'accepter, à me pardonner ce qui au final n'était pas de mon fait. Bien sûr j'aurais pu mieux faire, mais à quoi bon regretter maintenant ? Qu'est ce que ça changerai ?
Me voilà donc à te donner des nouvelles, alors que seul dans ma tête et mon coeur tu existes encore un peu. Mais ça me fait du bien.
Une sensation de déjà vu, déjà vécu, je repars à zéro, moins douloureux néanmoins, même si cela reste dur de toujours rebondir après un ou des échecs.
Je vais bientôt pouvoir repartir de chez les parents, reprendre ce que je considère une vie normale, ou du moins essayer d'y prétendre.
Tu m'as bien connu, tu imagines bien la montagne que je me fais de tout ça. Un nouveau boulot qui me plaît, mais assez loin, la recherche d'un appart, et l'envie de retrouver quelqu'un de bien avec qui construire ma vie. Je ne sais pas par quel bout prendre tout ça.
J'suis toujours aussi nul sur ce dernier point. Comme il y a presque 13 ans. Si tu ne m'avais pas sauté dessus, je n'aurais peut être jamais trouvé le courage de te dire que tu me plaisais.
Ben voilà, j'en suis au même point. Et puis faut avouer que tu n'aides pas vraiment. Tout en restant vigilant à ne pas faire d'amalgame entre toi, et celle qui viendra ; forcément j'aimerais, je rêve même, retrouver cette alchimie instantanée, qui nous a lié, avec quelqu'un.
J'avais écrit à ta maman, avec la maladroitesse d'un jeune homme de 19 ans, complètement paumé, complètement détruit par ce qui t'es arrivé et nous est arrivé, elle ne m'avait pas répondu. Il est des moments ou j'aimerais bien avoir de ses nouvelles tout de même, savoir ce que sont devenu tes 2 frères. Mais je n'ai pas envie de raviver non plus chez elle, tes frères et peut être même chez moi, cette douleur que cela a été.
Cette lettre morte est peut être un peu confuse, mais j'aurais tellement de choses à te dire si je le pouvais, que forcément, tout vient en vrac.
Le plus important pour moi, serait de te dire que je ne t'ai pas oublié. Mais j'ai arrêté de souffrir de ça. Te dire qu'en ce moment c'est pas la grande forme, je me sens un peu paumé, cette impression de marcher dans le brouillard. Te dire que je serais tout de même fier de te raconter les morceaux de ma vie depuis ton départ, ce que j'ai réussi, ce que j'ai loupé, et peut être pourquoi je les ai loupé.
Te dire que j'ai le sourire quand des souvenirs de nous me reviennent à l'esprit.
Te dire que j'ai un pincement au coeur quand je vois ma maman penser à toi. Tu étais si inquiète de ce que mes parents pouvait penser de toi, tu vois, j'aimerais te transmettre l'empreinte que tu as laissé aussi chez eux.
Mais surtout te dire à quel point tu auras marqué ma vie, à quel point tu as influé ce que je suis aujourd'hui, en bien ou en mal, à quel point d'avoir été le seul de ta trop courte vie m'honore, à quel point je te remercie.
Non cette larme qui coule sur ma joue n'est pas emplie de douleur, juste d'avoir évoqué un peu de toi me fait pleurer tout en souriant. Des larmes de bons souvenirs en somme.
Même avec des bribes de souvenirs, je ne t'oublie pas, et je n'oublie pas l'amour qu'il y a pu avoir entre nous.