En l'occurrence, aucun rapport. Il s'agit simplement d'un état de fait des prisons françaises, écrit par un "utilisateur". Trouver en détention longue un témoin non condamné, ca ne doit pas être si évident.
Je ne vois absolument pas le rapport avec un pardon pour ses actes, ou une ignorance des victimes.
Oui. Si j'ai fait le rapprochement avec Maurice Papon, c'est surtout pour que l'on oublie pas que si ce dernier n'a pas fini sa peine de prison, c'est en vertu de l'Art. 720-1-1 du code de procédure pénale (L. N° 2002-303 du 4 mars 2002) dite "loi Kouchner" :
"La suspension de peine peut également être ordonnée, quelle que soit la nature de la peine restant à subir, et pour une durée qui n’a pas à être déterminée, pour les condamnés dont il est établi qu’ils sont atteints d’une pathologie engageant le pronostic vital ou que leur état de santé est durablement incompatible avec le maintien en détention, hors les cas d’hospitalisation des personnes détenues en établissement de santé pour troubles mentaux.
La suspension ne peut être ordonnée que si deux expertises médicales distinctes établissent de manière concordante que le condamné se trouve dans l’une des situations énoncées par l’alinéa précédent."
Des quatre d'action directe, Joelle Aubron est morte, dix-mois après sa remise en liberté. Elle était atteinte d'un cancer en stade terminal, les médecins ne lui pronostiquaient que quelques mois de vie après sa libération.
Jean-Marc Rouillan est atteint d'un cancer du poumon. Nathalie Ménigon en est au troisième accident cérébral. Georges Cipriani est devenu fou, mais n'a pas droit à une détention dans un centre psychiatrique.
Maurice Papon, lui, fut libéré en 2002. Il mourra cinq ans plus tard. Comme quoi, il a bien résisté au pronostic vital absolument alarmant de ces médecins.
Ceci étant dit, on parle de Rouillan ou de Ménigon parce qu'ils sont capables de parler, et qu'ils sont connus.
Bien d'autres gens pourrissent aujourd'hui dans les prisons françaises, en attente d'une suspension de peine identique.
Ils sont malades du Sida, grabataires, atteints de cancers avancés, de pneumonie, d'hépatites. Ils sont une centaine à mourir ainsi chaque année de maladie ou de vieillesse dans les prisons françaises.
La France a été condamnée en 2003 par la cour européenne des droits de l'homme, dans l’
affaire Mouisel, pour violation de l’article 3 de la Convention européenne de sauvegarde, lequel article interdit les traitements inhumains et dégradants. Le détenu en question était atteint de leucémie lymphoïde chronique, soumis à une chimiothérapie en hospitalisation de jour, et était menoté durant les traitements, ce qui empêchait leur bonne application.
Ce n'est pas un cas isolé, bien au contraire. En voilà
un autre récent, et atterrant.
La loi sur les suspensions de peine pour raisons médicales n'est pas appliquée de façon juste, et c'est pour cela que j'ai cité Papon. Parce que derrière l'argument qui m'a fait réagir, il y a cette idée bien répandu que pour
ces assassins-là, l'éthique et la dignité la plus fondamentale, on s'en bat l'œil.
Parce Papon, lui, n'était pas de "ces assassins-là" ? C'était juste un assassin par passivité ? Il a exprimé des regrets ?
Non. Et il a été condamné pour crime contre l'humanité.
Je n'ai aucune complaisance envers Jean-Marc Rouillan, Nathalie Ménigon, Georges Cipriani ou feu Joelle Aubron.
Mais si les interventions publiques de Rouillan peuvent être relayées afin que cesse cette situation absolument indigne, qui veut que, faute de mauvaise volonté de l'administration pénitentiaire ou hospitalière, des gens soient condamnés à mourir dans nos prisons, c'est tant mieux.