De l'art du cadrage au scalpel…

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pour compléter, j'ai un jour discuter avec Maitre Witkin autour d'une bonne bouteille de Chablis et on causait cadrage : lui me disait qu'au fond, il ne cadrait pas comme un photographe, fermant ses photos avec du noir créé au tirage (ses photos sont faites à 90% au tirage avec un art de la contrefaçon aussi archaïque et aussi précis que les retoucheurs russes de la période stalinienne), qu'il composait comme un peintre du XVIIIème. Après qu'il ait vu deux de mes photos (des nus, anciens datant d'il y a 10 ans désormais), après des critiques très intéressantes que je me remémore toujours avant de faire des masques au labo ou sur l'ordi ou avant de faire des photos, il m'a dit un truc marrant (c'est un joyeux drille, il ne casse jamais, il flatte, sorte de critique positive) : "moi j'utilise des scalpels pour mes photos et vous c'est votre œil qui sert de scalpel… "

voilà, on a quand même du mal à s'en remettre après…
 
[MGZ] alèm;4195744 a dit:
je sais que les photos que je réussis le plus sont toujours celles où j'ai le moins réfléchi… Je m'explique, certains cadrages sont évidents à mon œil.

Voilà, tout est dit : faire de l'image, encore et toujours. Au début on réfléchit, c'est chiant parce que appliquer des règles c'est toujours chiant, on se plante, et puis un jour c'est un réflexe, une évidence. Comme écrire.
Souvenez-vous : apprendre que B et O ca fait Bo que D et E, DE, puis ensuite passer au cap supérieur, assembler tout ca, en faire des mots etc... quel enfer, toute la journée pour un gamin ! ;)
Mais après vient le jour où on oublie l'aspect "technique" de la lecture : les lettres s'assemblent automatiquement et la technique du B+O = BO devient transparente ; on peut se concentrer sur l'histoire et c'est là que ca devient génial de savoir lire. ;)
 
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Réactions: Ed_the_Head
Voilà, tout est dit : faire de l'image, encore et toujours. Au début on réfléchit, c'est chiant parce que appliquer des règles c'est toujours chiant, on se plante, et puis un jour c'est un réflexe, une évidence. Comme écrire.
Souvenez-vous : apprendre que B et O ca fait Bo que D et E, DE, puis ensuite passer au cap supérieur, assembler tout ca, en faire des mots etc... quel enfer, toute la journée pour un gamin ! ;)
Mais après vient le jour où on oublie l'aspect "technique" de la lecture : les lettres s'assemblent automatiquement et la technique du B+O = BO devient transparente ; on peut se concentrer sur l'histoire et c'est là que ca devient génial de savoir lire. ;)


Amok, je te suis...ces règles sont "universelles", comment qu'est ce qui fait que l'oeil du photographe est unique ?
Comment, avec ces mêmes règles de cadrages, ta photo sera différente de la mienne ?
 
parce qu'il est lui et que tu es toi, avec des mêmes règles, vous n'avez pas le même œil.

ceci dit, je me cite :

En citant Pierre
"Son regard, oui, son regard est resté le même, qui m'avait abusée ! (…) Il n'est pas jusqu'à la physionomie de cette fille qui ne l'incite à perpétrer enfin avec elle ce qu'il pense avoir voulu en vain jadis avec moi ! Tout ce qui lui fut refusé alors, il le prend sur cette créature, mais il lui ferme l'éternité qui fut ouverte tant de fois à lui-même !"
Contrairement à ce que d'aucune pourrait penser, je n'ose évoquer ici Klossowski pour parler de ma manière de vivre, cela faisait longtemps que je recherchais de nouveau ce texte. En quelque sorte et de manière cruelle et poétique, je trouve que cette évocation de Nietzsche, par l'un de ses plus lubriques fidèles, est une belle métaphore de la photographie. Ou plutôt, de la manière dont je ressens celle-ci. Je pourrais évoquer Pessoa qui me touche tant et qui pourtant bien lin de l'éternel retour présume justement que tout les phénomènes vécus dans son cerveau ont déjà été vécus par des milliers d'hommes avant lui. De même, quand j'ai commencé la photographie, mon maître me disait toujours : "tout a déjà été fait", comme une malédiction. Et moi de penser qu'il faudrait donc joyeusement recommencer. Me basant depuis toujours sur mon unique expérience, j'estime que nous sommes tous. Que chacun de nous contient les ferments de son voisin. Mais aussi de manière paradoxale que mon expérience propre est unique. Que ma vision l'est encore plus. Et qu'il me faut réussir à transcrire cette vision. Longtemps, le bégaiement associé à la dyslexie ont entâché mon expression et l'ont frustré jusqu'au jour où j'ai découvert quelques pinceaux associés à des crayons aquarelle. Un hasard. Un autre jour, j'ai rencontré un appareil photo. Pentax ME-F de mon père prêté pour aller faire des photos à un concert de jazz. Je voulais plaire mais je me suis fait happer par l'appareil. C'est lui qui m'a séduit. Elle aussi. Mais c'est une autre histoire et ce serait mal rendre hommage à nos bonheurs, accords et désaccords de notre presque vie commune sur 5 ans. L'appareil reflex m'a captivé. Depuis, j'essaye de photographier ce que mon regard a déjà collecté comme "mien". Des choses que je reconnais comme m'appartenant. L'impression immense de "déjà-vu". Mon regard est resté le même.
 
Amok, je te suis...ces règles sont "universelles", comment qu'est ce qui fait que l'oeil du photographe est unique ?
Comment, avec ces mêmes règles de cadrages, ta photo sera différente de la mienne ?

Alem t'a répondu ci-dessus, et moi, en partie, sur la page précédente ! ;)

Il ressemblent plus souvent qu'on ne croit, ces prétendus chasseurs d'apparences, à ces peintres qui plantent leur chevalet devant un paysage et peignent, dans un moment d'absence, une odalisque, c'est à dire une image qui est tout à la fois l'image de leur désir et celle de leur culture.


Qu'est-ce qui fait que tous les livres ne se ressemblent pas ? Ce n'est pas parce que nous parlons la même langue que nous pensons, écrivons, parlons...photographions de la même façon... ;)

Et puis, il y a le reste : la chance d'être là, ce que je vois et que tu ne vois pas même si nous sommes ensemble, ce que tu vois et que je ne vois pas même si nous sommes ensemble, le fait que tu aimes les gens et moi pas, que...
 
Alem t'a répondu ci-dessus, et moi, en partie, sur la page précédente ! ;)




Qu'est-ce qui fait que tous les livres ne se ressemblent pas ? Ce n'est pas parce que nous parlons la même langue que nous pensons, écrivons, parlons...photographions de la même façon... ;)

Et puis, il y a le reste : la chance d'être là, ce que je vois et que tu ne vois pas même si nous sommes ensemble, ce que tu vois et que je ne vois pas même si nous sommes ensemble, le fait que tu aimes les gens et moi pas, que...


C'était juste pour bien souligner (pour les forumeurs) que, certes les règles de composition, c'est bien de les connaitre et de les maitriser, mais ensuite, il faut apporter sa touche perso....et là c'est encore autre chose ;)
Nachtwey, sur la photo que tu as citée et "décomposée", il se fout des règles de compo, elles sont siennes, elles font parties de lui, elles sont complètement intégrées... comme tu l'as dit c'est une évidence pour lui (et pour d'autres.... :D ) si bien qu'il peut se concentrer sur l'essentiel : son sujet !
 
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Réactions: teo
c'est marrant, mais ce fil me plait beaucoup. Je l'ai déjà dit, mais c'est beaucoup grace à vous si je me suis remis à la photo. depuis; je lis, je me documente, j'écoute. Dernièrement, j'ai acheté un magazine photo et je suis tombé sur un article qui explique la règle des tiers.

J'essaye d'y penser en prenant mes photos, c'est vrai que c'est fastidieux mais quel plaisir de voir une photo réussi (postée) (sur le plan cadrage). J'ai même compris ce qui me dérangeait sur une autre photo (postée). La photo ést pourtant pas mauvaise, le sujet est sympa, les couleurs aussi, mais... en recadrant, j'ai enlevé l'âme de l'image, j'ai placé l'animal plein centre quand j'aurai du le décaler sur un "tiers" pour ouvrir la lecture vers la droite et... un autre animal. Certe moins intéressant en soi mais qui donne un "sens" au sujet principal.

Merci de ce fil et des commentaires avisés.:zen:

Bon, maintenant ça ne fera pas de moi un pro mais bon, ça me procure un sacré plaisir.:up:
 
Un autre exemple de composition sur une photographie de Depardon :

ex6.jpg


Notez comme le sens de lecture de l'image amène le regard vers les personnages, situés sur un point d'or. Non seulement cela est logique en terme de cheminement dans le cadre, mais de plus la composition est ainsi "fermée" : impossible pour l'oeil de continuer son chemin vers la droite.
;)
 
J'ai continué l'exercice sur Salgado par ça (désolé c'est encore de qualité pourrie) : une spirale d'or sur cette photo.
Je suis impressionné par la superposition de la spirale mais aussi des lignes de force à l'intérieur (traits en pointillées dégueu)... je n'ai pas essayé mais l'exercice avec une spirale mirroir devrait amener au personnage en arrière plan...

Image11.jpg
 
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Réactions: joanes
Notez comme le sens de lecture de l'image amène le regard vers les personnages, situés sur un point d'or. Non seulement cela est logique en terme de cheminement dans le cadre, mais de plus la composition est ainsi "fermée" : impossible pour l'oeil de continuer son chemin vers la droite.

Trop fort ce raymond... en plus y'a un effet de mise en abîme avec les étages inférieur

chaque courbe amène à un couple ou un individu
 
D'accord, pour ces règles/techniques de cadrage, mais en format carré, ça donne quoi ? on applique les mêmes ?
 
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