molgow a dit:
Au passage, selon moi, il y a quelque chose que l'on pourrait faire pour augmenter sensiblement l'attrait des transports publics, c'est de les rendre gratuits! (ou plutôt les faire payer par les impôts..). Les transports publics sont tout autant d'intérêts publics que le sont les routes, qui elles sont payées par les impôts, même de ceux qui n'ont pas de voitures...
Je suis pas sûr que ce soit une bonne idée.
D'abord certaines villes ont fait ce pari récemment. Il s'agit de Chateauroux (75 000 hab, gratuit depuis fin 2001), Vitré (16 000 hab, gratuit depuis 1 mai 2001), Mayenne (13 000 hab, depuis début 2002). Elles ont rejoint les villes qui ont ouvert la voie dans les années 70 : Colomiers (30 000 hab), Compiègne (40 000 hab). Ajoutons également Issoudun (23 000 hab, gratuit depuis 1989), ou Figeac (10 000 hab). A l'étranger, Bologne (Italie) avait tenté l'expérience dans les années 70 mais seule Hasselt (Belgique, équivalent de Chateauroux) ne fait plus payer depuis 1998.
La gratuité n'est pas gratuite. Dans ces villes relativement petites, les recettes dues au tickets ne sont aps très élevées par rapport au cout de fonctionnement, et la ville peut plus facilement remplacer le manque à gagner. Chateauroux a remplacé les 2.8 millions de francs perdus par une hausse du versement transport de 0.55 à 0.6%. A Vitré, c'est la mairie qui a compensé les 200 000 Francs. Dans ces villes, la part des recettes de traffic (vente de tickets) représentent moins de 20%, alors que dans les agglo importantes, on monte vite à 30%, et même à 42 dans le cas de Lyon. A Chateauroux, le cout du transport pour la ville a légèrement progressé, à 42 EUR/hab, ce qui est peu. Mais à Nantes, la contribution par habitant est de 84 EUR. A Lyon elle sest de 116 EUR. Passer au transport gratuit reviendrait à multiplier par 5 l'effort des contribuables.
La gratuité serait donc un frein au développement du transport urbain, puisqu'il rendrait plus difficile le financement des améliorations du réseau. Car il ne s'agit pas d'avoir des TC gratuits, il faut aussi qu'ils soit de bonne qualité. A Chateauroux, les bus sont pleins aux heures de pointe et laissent parfois des voyageurs mécontents sur le trottoir. A Vitré, comment effectuer 5 fois plus de traffic avec seulement 2 bus dont un au gabarit réduit? Ces réseaux sont figés. Or, pour que la gratuité soit vraiment effficace, il faut la coupler à des aménagements, des PDU.
Alors certes, la gratuité augmente la fréquentation. Chateauroux a effectué 3.3 millions de voyages en 2003 contre 1.5 en 2001 (mais 6 mois après la mise en place de la gratuité, la desserte a été refondue ce qui a eu un impact fort; la gratutié serait donc responsable de moitié de cette augmentation). A Vitré, le traffic a quintuplé, pour passer à 250 000 voyages par an. Selon les exploitants de ces réseaux, la gratuité n'amène pas beaucoup de voyageurs supplémentaires, elle change seulement leurs habitudes. Ce sont les mêmes personnes qui sont transportées plus souvent.
Bref.. la gratuité serait en quelques sortes un luxe de petites commune riche. Difficile d'extrapoler aux plus grandes villes, comme par exemple Grenoble avec ses 60 millions de voyages par an. Certains affirment que les recettes de ticket compensent exactement les frais pour les colelcter (controleurs, campagne de sensibilisation, entretien des systèmes de billetique, ...). C'est peut-être vrai dans les petits réseaux, mais pas dans les grands. La RATP estime le manque à gagner du a la fraude à 75 millions d'euros par an dans les bus. Cette somme certes importante n'a rien à voir avec ce que couterait le bus gratuit, 500 millions d'euros, une somme à quadrupler si tous les bus, métro et RER d'Ile de France étaient gratuits.
Quelques chiffres pour Grenoble (
www.semitag.com ) : En 2002, alors que la fréquentation payante augmente de 6%, les recettes commerciales diminuent de 1.5% en raison des tarifs incitatifs mis en place pour les jeunes ou les revenus faibles. Les recettes commerciales s'établissent à 17 millions d'euros. Les charges représentent, elles 67 millions d'euros. L'apport des recettes commerciales est donc loin d'être négligeable!
Enfin, ca me parait légitime que chacun contribue à payer sa part de déplacement. Ca responsabilise et ca évite la dérive qui ferait que, puisque le transport est gratuit, je me déplace de 50km au lieu de 5, ce qui demande plus d'offre, donc plus de nuisances.
D'autre part, si les gens choisissaient leur moyen de transport uniquement selon le coût, alors il n'y aurait pas grand monde en voiture! Honnêtement, le bus est déjà pas cher, et l'est encore moins lorsqu'on le prend régulièrement.
Voilà pour cette longue réflexion sur la gratuité (je me suis aidé d'un récent article de Rail & Transports, pour les chiffres)